Maculov Djeananhe Mentor

Ann fè listwa, une invitation à se plonger dans le passé pour un meilleur avenir

Temps de lecture : 5 minutes

A l’heure où le pays connaît une fuite de cerveaux et un nivellement par le bas, certains jeunes, de leur côté, nous redonnent espoir par leurs activités. Vous avez déjà vu une affiche présentant un fait d’histoire correspondant à la date du jour ? Si oui, c’est l’initiative d’un jeune étudiant en Histoire à l’IERAH/IRSS de l’UEH. La rédaction de Balistrad a rencontré ce jeune étudiant fougueux.

Balistrad : Qui êtes-vous ? Parlez-nous de vous ?

Mentor : Je suis Maculov Djeananhe Mentor, né à Léogâne, fils de André Jean Carmel Mentor dit Chem Mentor qui a eu une carrière politique. J’ai fait mes études primaires à l’Ecole des Frères Louis Borno de Léogane avant de passer au Collège Christianville. Actuellement, je suis étudiant en Histoire à l’IERAH/IRSS de l’UEH. Orphelin depuis mes 9 ans, j’aime le répéter, je me suis toujours débrouillé pour trouver ma voie et suivre mes rêves. Je suis un slammeur connu sous le nom de Mentor Zye Fiti. J’aspire à devenir écrivain pour partager mon vécu, mes rêves. Par ailleurs, j’aime les Sciences humaines et sociales. Voilà pourquoi je poursuis des études d’Histoire. Mon plus grand rêve est d’enseigner à une université étrangère pour une vue internationale.

B : Depuis quelques temps, on peut remarquer une affiche circulant sur les réseaux avec un événement de la date du jour portant l’inscription : « Ann fè listwa ». Qu’en est-il ? D’où vient l’idée ?

M : Je commencerai par répondre que l’idée m’était venue suite à quelques publications de NOFI mais aussi au constat d’un manque de culture, un désintérêt pour le passé. Tout a commencé avec le rappel du décès de Yvonne Sylvain le 3 octobre 1987, première femme médecin et fille de Georges Sylvain. Donc,nous sommes déjà à un mois de publication. « Ann fè listwa » est devenue depuis, une rubrique quotidienne qui présente un fait historique, quelque chose qui s’est passé en ce jour que nous nous faisons le devoir de rappeler ou du moins d’en informer le public. Et la conception est simple : une affiche avec une image, la date historique, quelques mots expliquant brièvement ce qui s’était passé ce jour-là, le htag #AnnFèListwa en haut et mon nom en bas.
A mes côtés, j’ai le Prof André Yves Pierre, le plasticien Antoine Godson, Emmanuel Préseau actuel président du Bureau central des étudiants et Windsor Bailly Hector, étudiant finissant qui en constituent le noyau.

B : Excellente initiative si on tient compte des informations fournies depuis le lancement. Mais quel est l’objectif ?

M : « Ann fèl listwa » propose quotidiennement un survol historique, un rappel des faits historiques. Nous avons également l’intention d’aller à la découverte des sites et patrimoines historiques de notre pays.

B : Jusqu’ici, on ne constate que des faits en rapport avec Haïti. Avez-vous l’idée d’élargir le champ à l’histoire mondiale ?

M : Nous pourrons toujours parler de l’international mais ce sera encore en rapport à un Haïtien, à une réalisation d’Haïti. Autant dire que le point d’ancrage restera Haïti même.

B : Quelles sont vos sources ? Comment vous y prenez-vous pour préparer les publications ?

M : Nous puisons sur internet, dans les éphémérides et les documents du professeur. Ces derniers représentent la dernière étape, en ce sens où ils demeurent notre dernier recours et notre moyen de vérification. Par exemple, il nous est déjà arrivé d’avoir des difficultés avec deux dates et ce fut justement ces documents qui ont eu le dernier mot et tranché.
En outre, Godson Antoine nous renseigne sur l’authenticité des images utilisées. Certaines fois, ce sont des peintures d’artistes haïtiens et le crédit leur est attribué dans le texte de la rédaction.

B : Une telle idée ne devrait pas laisser le public indifférent. Quels sont les feed-back ?

M : Assez intéressants, jusqu’à présent. On sent que le public apprécie le travail avec les félicitations et les encouragements qui nous parviennent sur les réseaux sociaux. Cela nous motive mais ne nous enfle pas la tête, ce qui importe pour nous ? Nourrir les mémoires. Au moins mille personnes sont touchées chaque jour et nous voulons apporter cette dose d’histoire quotidienne au public le plus large possible.

B : Vous venez de le dire, le travail commence à prendre un essor considérable. De plus en plus de personnes sont touchées, on en parle. Alors quelles sont les perspectives ? Allez-vous vous contenter de la publication quotidienne ?

M : Comme je l’ai déjà mentionné, l’un de nos objectifs est de partir à la découverte des monuments historiques et réaliser des conférences. Et nous avons une conférence prévue pour le jeudi 14 novembre 2019 sur l’absence du sentiment patriotique de nos jours. Nous prévoyons également de réaliser des expositions, des conférences avec les dates historiques, des ouvrages imagés mais pour le moment les difficultés économiques n’en font que des projets.

B : M. Mentor, il y a une question qui s’impose de droit et l’entrevue aurait été incomplète sans elle, surtout avec les différents champs qu’exploite « Ann fè listwa ». En effet, cette rubrique ne se cantonne pas à la publication de faits ou événements intéressant seulement la politique mais également d’autres domaines comme la culture par exemple. Alors qu’est-ce que l’Histoire ?

M : Le mot « Histoire » vient du grec « Historia » qui se définit comme la connaissance du passé acquise par l’enquêteur. En ce sens, nous pouvons dire que l’historien est un enquêteur. Plusieurs acceptions sont données à l’histoire parmi lesquelles « la science qui étudie l’évolution des sociétés dans le temps ». Cette société existant avec toutes ses composantes, il y a alors le rapport de l’Histoire avec les autres disciplines. De ce fait, elle peut tout à fait être une arme pour le développement de par son interconnexion avec les autres disciplines humaines. L’Histoire n’est pas seulement liée à la politique, comprenez qu’il existe une Histoire de chaque domaine : l’histoire du Droit, de la Médecine, de l’Art etc. En ce sens, « Ann fè listwa » veut utiliser l’histoire pour faire connaître le passé et aider à aplanir le chemin vers un meilleur lendemain. Avec la connaissance du passé (et dans quelque soit le domaine) il est possible de comprendre le présent et préparer l’avenir. L’Histoire ne doit pas rester figée sur le passé mais doit permettre d’ouvrir des perspectives d’avenir. Telle est notre compréhension à « Ann fè listwa » et la ligne que nous nous fixons.

B : Balistrad vous remercie de nous avoir accordé un peu de votre temps. Nous vous souhaitons bon vent dans vos prochaines entreprises. Vos derniers mots ?

M : Merci à Balistrad de m’avoir ouvert cet espace. J’exhorte les jeunes à ne pas baisser les bras quand ils ont un rêve, quelque chose à accomplir. Il faut savoir affronter les obsacles car ils font partie du processus. Ne les prenez pas avec découragement mais comme un challenge, un booster. Evoluer jeune à Léogâne, partout en Haïti, n’est pas chose facile, pour moi en tant qu’orphelin qui pis est mais je m’en sors pas mal. Peu importe votre domaine donnez-lui un angle esthétique, scientifique pour que vous puissiez évoluer et ne vous laissez jamais aller. En plus sachez que vous aurez toujours des gens pour vous barrer la route mais heureusement qu’ils seront là aussi, ceux qui vous aideront à avancer et partageront vos rêves comme j’ai trouvé des collaborateurs dévoués tel Godson Antoine. Vous ne pouvez pas y arriver seuls, alors ayez à vos côtés ceux qui se soucient vraiment de vous et de votre réussite. Malgré les boycottages croyez en vous et soyez optimistes !

Vous pouvez suivre « Ann fè listwa » à travers ses différents comptes sur les réseaux : Fb : Ann fè listwa Twitter : @AnnfèListwa et Ig : @annfèlistwa.

Witensky Lauvince

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