Poésie
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Makenzy Orcel, un poète maudit

Temps de lecture : 3 minutes

Dernière mise à jour : 27 octobre 2018 à 10h15

Makenzy Orcel, lui-même, dans son roman intitulé «Les Immortelles» dit : « La poésie n’est pas censée comprendre. Seulement sentir. Sentir jusqu’à pleurer ou vomir». Pour Makenzy, la poésie n’a pas une fonction messagère mais plutôt sentimentale. C’est ce qu’explique cet extrait tiré de son roman dans lequel il immortalise les putes de la Grand-Rue. En effet, la poésie comme création artistique, tout comme la peinture, ne saurait porter message. En revanche, elle nous fait ressentir mille et un frissons, nous fait rire, nous attriste et nous aide à penser et panser nos blessures les plus profondes.

Ouvrages de littérature

Le premier recueil de poèmes de Makenzy Orcel «La douleur de l’étreinte» a été déjà empreinte d’habileté et d’une bonne maîtrise poétique. «La nuit des terrasses» est un hommage à l’alcool, aux bars, aux femmes de joie…

En lisant Makenzy on peut penser à Bukowski et tant d’autres écrivains comme Baudelaire ou encore Arthur Rimbaud. L’alcool, les bars, la prostitution sont, entre autres, les thèmes de prédilection de cet écrivain qui a passé son enfance à Martissant. C’est un poète maudit. Makenzy est poète. Poète pour dire que parfois nous sommes des demi-dieux et nous faisons des miracles, des choses impensables et que nous nous dépassons malgré nos faiblesses et nos incertitudes.

«Nous traversons quelque part
Même la limite de nos rêves»

La poésie de Makenzy est blessure, angoisse. C’est un poète habité par l’enfance. Par les vicissitudes de la vie. C’est aussi un dépassement. Pierre Reverdy affirma ceci : «La poésie, même la plus calme en apparence, est toujours le véritable drame de l’esprit». Si l’on part du point de vue de ce dernier, on peut conclure que le fait d’écrire peut avoir une fonction libératrice, c’est-à-dire l’écriture, plus particulièrement, la poésie peut servir d’exutoire. Makenzy est dans un lyrisme fragile où il se sert du «je» et du «tu» pour donner libre cours à ses fantasmes, dire sa souffrance, son mal-être profond en restant dans un champ lexical.

«Ma bouche est un bassin versant
Qui saigne partout
Dans la dérive insulaire»

Ici, nous sommes en présence d’une métaphore cohérente. Mais, il faut dire aussi quand on a une bonne maîtrise de la poésie, on peut utiliser l’incohérence pour faire la beauté d’une image.

C’est le cas de Jeudinema qui a dit ceci à l’être aimé : «Nenpòt lè gen eleksyon/Je fèmen/Tete w m ap vote». L’image paraît absurde mais le poète n’est pas dans le déjà-dit. L’originalité est indispensable à la poésie. Cette dernière doit aussi avoir la capacité de surprendre voire choquer. Paul Valéry affirma que le poète se consacre à créer un langage dans le langage. Ainsi, le langage du poète ne doit pas être celui du commun des mortels.

Bref, Makenzy, romancier et poète maudit de son état, a la parole qui choque «une ville qui n’a pas de putes est une ville morte», avance-t-il dans son roman intitulé «Les Immortelles».

Roman

Albert Camus avait soutenu que la vraie générosité envers l’avenir consiste à tout donner au présent. Makenzy semble être de cet avis. En témoigne ce vers de «La douleur de l’étreinte»

«Demain se nomme
Inertie de chien».

Ce vers de Makenzy a une portée philosophique. Il faut dire que la vie est fragile et insaisissable. Pourtant, il y a des viveurs, des hommes qui la croquent à pleines dents. Oui, ces gens qui croient que seul le présent nous appartient. Makenzy témoigne de l’amour et du respect pour les travailleuses de sexe. La prostitution, dit-on, c’est le plus vieux métier du monde. Il y a un rapport entre les putes, les trottoirs et le soir. Makenzy les associe pour faire un véritable hommage.

«Si les putes n’ont pas de tombe
Je jettrai des fleurs
Aux trottoirs
Au soir lointain»

Bonel Auguste présente Makenzy comme quelqu’un qui cherche à s’extirper de la blessure – qui s’étend dans tout le texte. Cependant, il y a aussi un érotisme qui coule le long du livre. Déjà le titre «La douleur de l’étreinte» fait poésie. C’est un oxymore.

Comment peut-il avoir de la douleur dans l’étreinte ? Une (re) lecture de ce recueil de poèmes peut s’avérer intéressante. Vivement la poésie.

Joubert Joseph

À propos Joubert Joseph

Joubert Joseph, né à Port-Margot le 29 avril 1997, passionné de poésie depuis son plus jeune âge, est poète et journaliste. Il a publié respectivement «15 poèmes pour un million d'étreintes» et «Léa ou La beauté en mille morceaux». Deux ouvrages qui ont été salués par la critique. Il a étudié le journalisme à l'Isnac et travaille actuellement comme reporter à Radio Kiskeya. Rédacteur à Balistrad, Joubert Joseph opte pour un «journalisme responsable.»
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