Moment troublant

Temps de lecture : 3 minutes

Dernière mise à jour : 15 avril 2019 à 12h19

Dans ma famille la tradition nous est chère. Certains héritages nous sont légués de père en fils et de mère en fille. Dans deux jours, je vais vivre un moment important dans la vie d’une jeune fille. Je suis un peu jeune pour ça vous allez dire, mais du haut de mes 21 ans, je suis déjà finissante en droit, je travaille pour une compagnie prospère, et l’argent n’a jamais été un problème pour ma famille. Donc je disais, vendredi prochain je vais enfiler cette fameuse robe, tout comme ma mère et Mamie l’ont fait avant moi. Je ne cache pas mes émotions! Je suis la femme la plus heureuse du monde.

J’avais déjà tout prévu: les talons assortis, le petit bracelet en perle que m’a offert ma nièce, le décor et même les différentes saveurs des pâtisseries. J’avais même invité Célia, ma meilleure amie qui habite en Argentine. Je voulais que tous les gens qui comptent pour moi soient présents. je sais pertinemment que papa est fier de moi, là où il est. Alec, mon grand frère se faisait un plaisir de m’accompagner à sa place.

Mon cœur battait la chamade . La maison en branle abritait les nerfs de tout le monde. Pourtant, ce n’était que la veille du jour J. Une avalanche de questions douteuses me cessaient de trotter dans mon esprit . Saurais-je remplir mon rôle? Serais-je satisfaite? Ressentirais -je la même chose dans dix ans?

Ah… ce n’est vraiment pas le moment! D’ailleurs, Edouard était irréprochable. Il me rassurait et était toujours là pour moi. C’était mon mentor et mon modèle, et par dessus tout, on s’aimait éperdument. Le téléphone sonna. C’était lui! Il savait que je peux pas rester en place. Nous avions une douce conversation de plusieurs heures et sa voix m’apaisa … Une chose manquait à mon bonheur : il n’était pas près de moi. Foutue tradition! Moi je le voulais là maintenant, et laisser parler nos pulsions. On s’entendait assez bien sur ce point soit dit en passant. Cependant, je devais contenir mon désir jusqu’à demain après midi.

Le jour J arriva enfin! Je sentais le stress m’envahir, et mon cœur battait aux rythmes de mon empressement et de mes craintes. Le sort en est jeté ! je ferai le grand saut! Finis les enfantillages, à présent c’est mon futur qui se dessinait… La limousine blanche que j’avais louée me déposa devant la fameuse église . Pendant un temps, je m’étais sentie comme une comédienne qui s’apprêtait à monter en scène.

Je fis mon entrée à petits pas, défilant sur un lit de pétales de roses blanches. J’essayai sans succès de contenir mon émotion. Je balayai l’église des yeux pour détailler mes invités, jaugeai ,malgré moi, leurs tenues… Alec m’avait accompagné jusqu’à l’autel sous le doux rythme d’un classique. C’est à ce moment que je croisai son beau regard. Et puis, le vide… Je restai bloquée immobile, tétanisée. Je ne m’attendais vraiment pas à cela et Alec le remarqua. Je sentis ce regard transpercer le mien comme la première fois au point de devenir gênant. Il me fallait absolument reprendre le contrôle et continuer ma marche jusqu’à l’autel où le prêtre nous attendait.

Dans ma tête défilait notre histoire : la façon dont il m’avait séduite, nos torrides moments, les nuits dans sa maison de campagne, sur mon bureau quand je feintais une pile de dossiers. Pire, il sortit son arme destructrice :ce petit sourire idiot qu’il savait ma faiblesse. Mes rêves s’écroulèrent tel un château de sable. On s’était aimé sans retenue car on vivait chaque ébat comme le dernier . Ne tombons- nous pas toujours amoureux de ce qui nous échappe ? Je ne parviendrai peut-être pas à me retenir cette fois. Je le savais. Il connaissait la légèreté en moi alors qu’Edouard représentait ma sécurité et ma constance. Les deux assuraient mon équilibre. En jurant fidélité à Edouard ( Dieu seul sait que je respecterai mon serment… peut-être), je finirai par me perdre et je ne saurai garder aucun d’eux. Désolée Edouard, j’ai besoin de mon amant, Andy pour que tu continues à m’aimer. En plus , qui a décrété qu’on ne pouvait s’aimer que dans le mariage ? Ooo.. Andy que m’as- tu fait? Tu n’aurais jamais dû venir à mon mariage…

Olivier Mortel

À propos Olivier Mortel

Mortel Olivier est un étudiant en 5ème année de médecine, comédien dans Les Amants de la scène, et Coordonateur de YAD-HAÏTI (Youth Association for development) Il est passionné par tout ce qui touche l'art en général. Il aime exprimer ses observations, sa vision a travers ses textes.
x

Check Also

Pensées d’un insomniaque

Traqué par le son agaçant des insectes, suffoquant de chaleur ...

Share via
Copy link