Coupe du Monde

La Coupe du Monde et nous

Temps de lecture : 2 minutes

Dernière mise à jour : 19 juin 2018 à 13h19

Un vieil adage laisse croire que l’Haïtien n’aime que deux choses : le carnaval et le football. Nous sommes à la 21ème édition de la Coupe du Monde qui se tient depuis 1930. La compétition envahit tous les espaces de communication : radio, télé, réseaux sociaux…

Coupe du Monde

En Haïti, c’est devenu viral. Depuis la veille de ce grand événement mondial, des quartiers avaient été déjà décorés, soit des couleurs du drapeau brésilien, soit de celles du drapeau argentin, tout dépend de la préférence des habitants. Apparemment, ces deux équipes-là sont les plus aimées en Haïti.

Néanmoins, c’est le moment pour certains de lancer des piques à des amis; c’est le moment pour d’autres de se chamailler et parfois même de se battre pour des joueurs qui ont, sans doute, des millions sur leur compte en banque et n’en ont cure des disputes à leur sujet. Les réseaux sociaux s’enflamment. Nous nous transformons en chroniqueurs sportifs. Nous commentons et analysons les matchs ici et là.

Si cette compétition internationale de football qui se déroule ordinairement tous les quatre ans nous sert d’anti-stress, elle ne manque pas aussi de mettre à nu l’échec flagrant du système éducatif haïtien. Nous pouvons prendre l’exemple du député de Roche-à-Bateau qui nous a souhaité une «Bonne fête Coupe du monde». Certains fans du Brésil hissant le drapeau brésilien sur fond de l’hymne national haïtien avant le match opposant la Seleçao à la Suisse. Ce qui prouve notre déficit de civisme et de citoyenneté. À voir cette réaction, Jean Price Mars pourrait parler de «bovarysme collectif.» Tout ceci est lié à notre manque d’éducation.

L’État n’arrive pas à gérer les ordures jonchant le Champ-de-Mars, situé à quelques mètres du Palais National. Pourtant, l’administration Moïse-Lafontant a trouvé de l’argent pour essayer de conquérir le cœur de certains citoyens en y plaçant des téléviseurs à l’intention des fans du ballon rond. Le gouvernement ne travaille pas pour que les citoyens aient de l’électricité chez eux pour pouvoir allumer leur téléviseur mais les invite à venir au Champ-de-Mars pour respirer l’odeur d’urine et s’asseoir tout près de montagnes d’immondices. La Coupe du Monde va passer et les générations à venir nous demanderont des comptes.

Nous sommes devenus de plus en plus passifs. Nous nous en foutons de plus en plus de certaines choses qui peuvent avoir des répercussions négatives sur notre situation sociale. Le gouvernement annonce la hausse du prix des produits pétroliers, nous nous en foutons. Pour le moment nous avons la Coupe du Monde qui broit toute notre capacité de réflexion. Nous fêtons. Nous rigolons. Et nous disons tant pis pour tout.

Nous acceptons des dirigeants de plus en plus incompétents qui nous insultent à tout bout de champ. Les rivalités entre gangs bloquent parfois la Route Nationale numéro 2. Le Premier Ministre Jack Guy Lafontant, médecin qui n’avait pas payé ses taxes pendant un nombre incalculable d’années, dit que ce n’est pas grave puisqu’il n’y a ni dix ni vingt personnes tuées.

La Coupe du Monde, en bon tranquillisant, nous aide à oublier toutes ces choses graves très rapidement. Puisque le cerveau d’un bon nombre d’entre nous est transformé en un véritable terrain de football.

Joubert Joseph

À propos Joubert Joseph

Joubert Joseph, né à Port-Margot le 29 avril 1997, passionné de poésie depuis son plus jeune âge, est poète et journaliste. Il a publié respectivement «15 poèmes pour un million d'étreintes» et «Léa ou La beauté en mille morceaux». Deux ouvrages qui ont été salués par la critique. Il a étudié le journalisme à l'Isnac et travaille actuellement comme reporter à Radio Kiskeya. Rédacteur à Balistrad, Joubert Joseph opte pour un «journalisme responsable.»
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